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(Pour comprendre ce titre, chantez-le sur l'air de "mes amis, mes amours, mes emmerdes" d'Aznavour)

La nouvelle sauvage

Publié le 2 Mars 2015 par Camille

La nouvelle sauvage

Aujourd’hui, d’une humeur quelque peu maussade, fatiguée de n’avoir fermé l’œil de la nuit, d’avoir fumé un paquet de fausses cigarettes tout droit arrivées du Duty Free de Buenos Aires devant quelques séries d’un autre âge, puis passé la matinée à répondre aux dizaines de messages qui s’étaient accumulés dans ma boîte mail durant le weekend, je décidai, sur un coup de tête, et puisque j’étais une fille qui adorât les surprises mais qui n’en reçu que rarement, de m’offrir la joie de quelques heures de relaxation devant un film distrayant. C’est ainsi que, convaincue, je claquai la porte de la maison, n’emportant avec moi que ma carte bleue, et marcha d’un pas léger mais non moins énergique jusqu’au cinéma, évitant par chance les fameuses mais pourtant nécessaires giboulées de mars de ce fameux nouveau lundi, toujours empli de promesses –non tenues-.

"Les nouveaux sauvages", était le film qui avait retenu mon attention. M’installant avec mon inséparable Coca Light sur un confortable fauteuil de velours rouge, je m’apprêtai à me délecter de ce chef-d’œuvre… Dont je ne fus point déçue. Outre la merveilleuse réalisation (et oui, chers oncles et grand-père, finalement, ces heures interminables passées à vous écouter commenter avec panache et passion les plans de tous les films qui font la Une avaient, sans que je m’en fusse rendu compte, aiguisé mon jugement sur l’importance du regard de l’œil vissé arrière-caméra), je fus admirative aussi du génie des scénaristes qui avaient là, pour mon plus grand plaisir, résumé en une heure et demie mon état d’esprit le plus profond. Celui que j’essaye habillement de cacher sous des sourires aimables et des formules polies d’usage. Cette éducation donnée "à la baguette", n’est-ce pas Maman -Haha !- qui étouffe parfois ma véritable nature : la furie et la cruauté à l’état brut.

Je m’explique, et vous compatirez fort bien, j’en suis certaine, à mon argumentation, au fil de ces lignes...

Quelle jouissance ne serait-il pas, de pouvoir laisser éclater, sous les traits féroces d’un géant de violence, cette boule de feu qui prend forme dans l’estomac, et qui ne demande qu’à exploser en une multitude de petites boules de feu brûlantes qui terrasseraient instantanément un interlocuteur peu scrupuleux, exprimant ainsi au plus juste tous nos sentiments refoulés ?

Que celui qui n’y a jamais songé me jette la première pierre…

Avouons-le : qui d’entre nous n’a pas imaginé cette scène délicieuse : un enfant insolent à table, à qui nous explosons la tête en l’attrapant fermement par l’arrière du scalp, lui enfonçant le visage dans cette purée Mousseline dont il a osé médire la saveur, tout en le traitant de petit fils de chien ?

Et ce "jeune des banlieues", qui entre dans le métro avec sa capuche enfoncé sur sa petite tête de rat, d’énormes écouteurs jouant à fond un morceau de rap –ou autre métal- dont les rythmes nous font des palpitations… Qui n’a pas rêvé de lui enfoncer sa capuche jusqu’au menton, lui assénant un coup de genou dans le ventre, lui enfoncer son casque Beats au fond de la gorge en le renvoyant chez lui à coup de pied au cul ?

Qui oserait ici me dire qu’il n’a jamais rêvé de casser les dents à coup de marteau à un voisin qui mange bruyamment à côté de nous, nous faisant profiter des détails de sa mastication puis de sa déglutition, voir même oh ! Infamie, d’un rot discret de satisfaction ?

Qui n’a jamais pensé à castrer le scélérat qui, n’ayant pas ramassé la crotte puante de son chien au milieu du trottoir, nous inflige l’humiliation lamentable de l’écraser à plein pied juste avant de rentrer chez nous ?

Qui n’a pas rêvé de retirer à la petite cuillère les yeux de leurs orbites à cette fliquette zélée qui nous aligne pour une broutille ?

Qui ne s’est jamais imaginé arracher les cheveux par poignées à cette fille trop entreprenante -et de plus dotée d’un beau cul- qui fait de l’œil à notre homme ?

Qui n’a pas songé à asperger d’essence une parente éloignée, de craquer une allumette et la regarder brûler comme la sorcière qu’elle est, à la suite d’une réflexion désobligeante sur notre façon d’élever nos enfants ?

Qui n’a jamais aspiré à secouer comme un vulgaire olivier dont on voudrait faire tomber les fruits mûrs pour en extraire, en les écrasant sous une pierre centenaire pesant des tonnes, l’huile généreuse, une connaissance qui nous raconte avec une mollesse exaspérante, ses journées inintéressantes, tout en usant d’un tic insupportable de levé d’yeux aux ciel dans un battement de cils ridicule ?

La tête pleine de ces images un peu folles, mais tellement revigorantes au final, je remontai ma rue après la séance, ignorant le froid qui mordait mon visage, et après avoir visualisé mes plus viles pensées intimes que je me sentis, chers lecteurs, pour le moins apaisée et décidai, raisonnablement, de rester la gentille Camille polie et courtoise… Oui, en me livrant à de tels agissements primitifs, je risquai d'avoir quelques problèmes avec la justice…

Allez ! Parons-nous de notre plus beau sourire et rangeons notre violence dans notre poche, avec un joli mouchoir en lin brodé par dessus.

OUF ! ça va mieux :)

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